lundi 13 avril 2015

Dead Calm

Magellan l'avait bien dit: le Pacifique est... pacifique. Nous pouvons vous en dire des nouvelles, Sir Ernest et moi, qui sommes scotchés sur la mer lisse. Ici, l'océan est d'un gris uniforme, immense et vide, parcouru de très longues ondulations. Quelques ridelettes troublent la surface de l'eau. Le ciel est aussi uniformément gris ou blanc laiteux, cela dépend de l'heure.  Rien à l'horizon. Ni bateau dans un rayon de 150 nm sur l'AIS, ni cétacé, ni oiseau...
L'océan gris et calme


En fait, ce n'est pas tout à fait vrai. J'ai la visite, plusieurs fois par jour, d'un fou brun qui vient faire le tour du bateau, deux-trois fois et de tout près, en me scrutant au passage de son oeil noir. Histoire de voir si je ne déprime pas trop ? Je vais finir par lui donner un nom.
Un fou brun
J'ai aussi vu passer quelques paille-en-queue, qui signalent le début des Tropiques. En effet, la température s'est réchauffée: il m'arrive d'être en t-shirt pendant la journée, l'eau est à 21°5. Excellente nouvelle.
Un paille-en-queue
Et la vie à bord suit son cours. Le bateau essaie d'avancer coûte que coûte. Il fait ce qu'il peut,le pauvre, mais avec 3 noeuds de vent on ne peut pas lui demander de miracle. Les équipiers silencieux du bord ont décrété que travailler dans ces conditions infernales ne faisait pas partie de leur cahier des charges. Roméo, par l'intermédiaire de son syndicat, a annoncé qu'il ne barre qu'à partir de 10 noeuds de vent. Charlie, le pilote électrique, est libéré de toute obligation professionnelle lorsqu'il n'y a pas de soleil. Qui va barrer, alors ? Essayer de saisir les misérables bouffées qui volètent sur la mer ? Il faut bien que quelqu'un s'y colle ! Souvent, c'est moi...

Mais pour compléter l'équipage, nous avons dû engager Miss Sandowette, nouvelle venue à bord. Vous être curieux ? Mais c'est tout simple, Moitessier faisait de même: 2 sandows (des tendeurs pour les non-initiés au parler suisse) tiennent la barre et le bateau va tout seul. La Miss ne se débrouille pas trop mal, je vous le jure. Je peux même aller dormir, parfois, et laisser le bateau avancer tout seul à 2 noeuds, dans plus ou moins la bonne direction. Grâce à ce travail de tous les instants, nous grignotons, grappillons des milles et cela avance sur la carte. Mais oui, mais oui, c'est incroyable.

Dur d'apprendre la Zénitude, moi je vous le dis. Très facile en chambre, un peu moins par 20° Sud et 79°W, quelque part sur la mer, au sud du Pérou...

Joya

PS: Vous n'avez pas vu Dead Calm ? Ce film terrifiant qui se passe sur un voilier encalminé au milieu de nulle part ? Pour ma part, je suis sûre de devoir une partie des angoisses qui m'assaillent dans les grands calmes plats à ce film.

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