vendredi 28 mars 2014

Cela pourrait être pire !

Cela fait dix jours que nous sommes parties de l'Île de Pâques. J'ai l'impression que cela en fait dix fois plus. Pendant les huit premiers jours, nous avons franchement bien avancé et surtout dans la bonne direction. Les journées se sont enchainées sans rien de très notable, si ce n'est qu'il fait de plus en plus froid. Plus nous irons vers le sud, moins nous aurons chaud. Les nuits deviennent vraiment glaciales et il a même fallu sortir des couvertures plus chaudes ! Le climat tropical me manque déjà...


Hier, le vent a tourné dans une mauvaise direction pour nous ce qui nous force à aller beaucoup plus au nord que nous le voudrions. Nous faisons donc du près avec 20 noeuds de vent et le ciel est tout gris. Ce n'est vraiment pas agréable et la place la plus confortable du bateau reste encore nos couchettes (dans lesquelless nous sommes bien calées). Du coup, je passe beaucoup de temps à dormir et à lire.

Cela pourrait être pire ! Quoique je commence à être sérieusement en manque de hamburgers. En ce moment, nous mangeons surtout des soupes de nouilles instantanées parce que c'est très facile à faire, mais ça ne remplace pas un bon steak...
J'ai hâte d'arriver à Puerto Montt !
M.

dimanche 23 mars 2014

En route pour le Chili

Nous voici dans notre quatrième jour de traversée pour le Chili. Aujourd'hui, il fait beau, il y a suffisamment de vent pour nous faire avancer à une bonne allure, et dans la bonne direction, en plus ! Hier, nous avons pêché un poisson mais il était apparemment beaucoup trop gros pour nous puisqu'il est parti avec notre leurre et une partie du fil de pêche. Tant pis, nous sommes bien décidées à manger du poisson frais, un de ces jours. Alors aujourd'hui, nous avons sorti un nouvel appât. Avec un peu de chance, nous arriverons à pêcher quelque chose, et de pas trop gros !


Sinon, nous avons déjà bien pris le rythme de la traversée. Nous nous habituons à la fatigue et au bateau qui bouge, et nous positivons le plus possible.

De toute façon, nous n'allons pas nous plaindre ; tant que nous avançons dans la bonne direction, tout va bien !
A bientôt,
M.

lundi 17 mars 2014

Notre séjour sur l'île

Rapa Nui est une île magnifique. En arrivant, le couple de français nous a dit : “C’est vrai que ce n’est pas un endroit très reposant, mais cela en vaut la peine.” Alors ça, de la peine, on s’en est donnés ! Mais effectivement, cette île est sublime.

Rapa Nui a été un désastre écologique à la fin de l’âge d’or de la civilisation des Moaï. En déforestant toute l’île pour transporter leurs précieuses statues, symboles de puissance, les sources de nourriture de la population disparurent ce qui les mena à la famine. Depuis, l’Île de Pâques subit une forte érosion des sols.
Je m’imaginais donc une île très brune et aride avec peu de végétation. Mais pas du tout ! Et c’est ce qui me plaît le plus ici ; tout est vert. Il y a de l’herbe ! Du gazon, des fleurs, des bananiers dans les jardins, etc. Après les Galapagos et les traversées, c’est tout simplement du bonheur pur.


Et puis, il y a des Moaï vraiment partout. Le tourisme est la seule ressource économique de l’île et son emblème est donc bien mis en valeur. Par exemple, sur le petit port, il y a deux Moaï pour nous accueillir. Les archéologues en ont retrouvé 887 pour l’instant, dont 288 sur les sites funéraires qui sont sur la côte. Les autres statues ont été retrouvées dans la carrière où ils les construisaient ou abandonnées en route. Nous pouvons donc marcher tranquillement le long de la mer et observer de magnifiques Moaï.


Vendredi, nous nous sommes offert un tour de l’île avec un guide. Nous avons donc pu observer l’île de l’intérieur et visiter tous ces lieux que nous avons toujours vu sur des cartes postales. Le clou du spectacle est les quinze Moaï qui sont vraiment le symbole de l’île. Tous les Moaï de l’île ont été abattus, face contre terre, par les diférents clans de Rapa Nui, entre le XVIIe et le XIXe siècle. Mais ces quinze statues ont été de nouveau érigées par une compagnie japonaise comme cadeau aux habitants de l’île.

Ces Moaï sont... impressionnants. Ils sont immenses et magnifiques. On peut tout à fait comprendre pourquoi ils étaient tant vénérés.


Nous avons aussi visité la carrière dans laquelle la majorité des Moaï a été abandonnée, faute de ressources. C’est un endroit très touristique, peut-être même un peu trop pour nous, mais il était intéressant de voir ces statues à l’abandon. Elles sont le symbole de la déchéance d’une société qui a trop usé les ressources que la terre lui offrait (cela ne vous fait pas penser à quelque chose ?). Les chefs de clans cherchaient toujours à en construire de plus grands, de plus lourds, pour montrer leur supériorité. Notre guide nous a fait remarquer les visages très sérieux de tous les Moaï : “They were very serious people with crazy chiefs.”


Notre dernier arrêt de la journée était à Anakena, une jolie plage de sable blanc. Il y avait de l’herbe, des palmiers et des Moaï au bout de la plage. C’était magnifique et j’en ai profité pour tremper mes pieds. Ce fut l’un de nos rares moments de pure détente. Une heure de repos, sans inquiètude et avec un sol immobile sous nos pieds. Quel soulagement !



Samedi, j’ai fait une discovery dive avec le magasin de plongée qui fait face au port. Il n’y avait pas beaucoup de poissons mais la visibilité était absolument incroyable et nous avons même vu une tortue ! J’ai adoré ces trois-quart d’heure sous l’eau à nager avec les poissons. C’était magique.


Les autres jours de la semaine, nous avons surtout refait le plein d’eau, d’huile et de fuel et nous avons acheté plein de fruits frais. Le village est joli et les gens sont très gentils. Beaucoup parlent français parce qu’ils ont de la famille en Polynésie française. Nous avons tenté de nous reposer du mieux possible malgré quelques mésaventures.

Nous avons eu un coup de vent très violent, hier, mais heureusement, nos ancres ont tenu. Par contre, question détente, nous avons vu mieux !

Sinon, mercredi, après avoir fait les pleins d’eau, nous avons eu le malheur de nous coincer une corde dans l’hélice du moteur de notre annexe. Il s’est immédiatement éteint. Nous n’étions pas très loin du port, mais les vagues nous poussaient contre les rochers et nous avons dû ramer jusqu’au bateau. Nous avions le vent et les vagues contre nous et ce fut tout simplement un enfer. J’ai perdu toute notion du temps, seul comptait ma rame qui s’enfonçait encore et encore dans l’eau... Le bateau était désespérement loin et nous sommes arrivées dans un état d’épuisement extrême. Ensuite, il a fallu monter les dix bidons d’eau sur le bateau puis Joya a plongé pour décoincer l’hélice. Heureusement, le moteur n’a pas subit de dommage, mais nos bras, eux, ont subit de sacré courbatures ! Ce n’était pas exactement ce que nous entendions par : “Une fois arrivées à l’Île de Pâques, nous pourrons nous détendre.” Cette aventure a au moins eu le mérite de me faire réaliser ma pauvre condition physique. Je sens qu’une petite session de musculation va s’imposer dès mon retour à Genève !


Nous partons demain pour minimum trois semaines de traversée, direction Puerto Montt, Chili. Nous allons devoir passer au sud d’un grand anticyclone pour pouvoir attraper les vents portant vers l’est. Avec un peu de chance, cette traversée ne sera pas trop éprouvante...


Allez, haut les coeurs ! Ce sera ma dernière longue traversée pour longtemps... Après cela, il nous faudra une semaine au Chili puis nous retournerons à Genève. Mon Dieu, que le temps passe vite.

Deux ou trois choses que nous savons de Rapa Nui


Nous devions partir aujourd’hui, mais nous avons changé d’avis. Finalement, nous ne partirons que demain. Histoire de laisser passer cette perturbation faite de grains et de vents forts qui nous pourrit la vie — Hier, le vent a soufflé à 35 noeuds établis pendant tout l’après-midi, Sir Ernest arc-bouté sur ses deux ancres .... Pas marrant.
Rapa Nui n’est pas une escale reposante et nous n’aurons pas eu le temps de faire des randonnées — monter au volcan, visiter les grottes. Une autre fois, peut-être.

Ces quelques jours nous ont permis d’en apprendre plus sur l’île, grâce aussi à  Tengaki, notre guide local.
Les statues font face à la terre, jamais à la mer. Pourquoi ?
mais, explique Temana, pourquoi regarder au large ? Les habitants de l’île vivaient tellement isolés, aucun visitieur en plus de mille ans, vous imaginez ? Il n’y avait rien à attendre du large... d’ailleurs, les indigènes ont accueilli Cook et La Pérouse, les fameux explorateurs européens, à jets de pierres.


Donc les statues, qui représentent des ancètres remarquables, font face au village à côté duquel elles sont construites.
pensez au facteur humain, s’enflamme encore Tengaki. Ce sont les Vieux qui détiennent la connaissance, qui peuvent transmettre les savoirs — la pêche, l’agriculture, la construction des abris de paille, la sculpture...Imaginez... il n’avaient pas de métal sur l’île, toutes les statues ont été sculptées avec des couteaux taillés dans une roche d’obsidienne.

Comment ont-ils été dressés, ces  Moaï qui font parfois 10 mètres de haut et 35 tonnes ? Là, les théories divergent. Il y a ceux qui les font rouler sur des rondins, pendant des kilomètres. Expliquant du même coup la déforestation de l’île. Les forêts auraient été dévastées pour des raisons de prestige et de pouvoir.
D’autres font marcher les statues. En les dressant puis en les faisant doucement basculer de gauche à droite, on peut  faire avancer les géants vers l’ahu auquel ils sont destinés. Des essais ont montré la faisabilité de l’opération, et la théorie trouve un écho dans les récits traditionnels, qui racontent que les Moaï marchaient de la carrière où ils étaient construits à leur ahu, la plateforme rituelle en bord de mer.


La vie était dure sur l’île de Pâques. Une île tellements isolée, dévastée par les guerres internes entre clans qui firent des ravages humains et écologiques. Certains chercheurs considèrent d’ailleurs aujourd’hui la catastrophe écologique de Rapa Nui comme un exemple ( à ne pas suivre) des conséquences de la folie et de l’orgueil humains.
Tengaki raconte que dans les années 1960, il ne passait qu’un cargo par an à Ranga Hoa. Qu’au 19e siècle, la famine était telle qu’on pratiquait le canibalisme — d’après le témoignage d’une vieille dame qui racontait vers 1912 avoir assisté, enfant, à ces pratiques. La situation est toute différente aujourd’hui avec un aéroport et deux cargos par mois. Mais toujours pas de port digne de ce nom, le cargo est ici, comme aux Galapagos, déchargé par des barges qui font le va-et-vient avec la terre.

Et il y a la langue. La plupart des habitants de l’île parlent le rapanui à la maison et entre amis. L’espagnol est la langue officielle, mais tous les écritaux sont bilingues. Cette langue polynésienne est très proche du tahitien, du maori (Nouvelle Zélande), ou du hawaïen. Tengaki nous affirmait comprendre ses interlocuteurs polynésiens, de la même façon qu’un Espagnol comprend un Portugais...

Alors... mau ruru Rapa Nui, iorana !
(Gracias, Rapanui, hasta luego ! — Merci, Rapa Nui, à bientôt !)

Joya

samedi 15 mars 2014

Rapa Nui pratique

Voici quelques infos pratiques pour ceux qui voudraient venir jusqu'ici en voilier. Attention: les informations que l'on peut trouver sur Noonsite sont obsolètes. Il n'y a plus de bouée à laquelle s'amarrer; il n'est plus obligatoire (mars 2014 - cela pourrait changer) de laisser une personne à bord.

Mouillage
On mouille sur son (ses) ancre(s), par 20 mètres de fond. Plus près du rivage il n'y a que du rocher ou du corail; cela m'a été confirmé par les plongeurs du club Orca, dans le petit port de Hanga Roa.
Le mouillage est très ouvert et rouleur, même après plusieurs jours de vent d'est dominant comme ce fut le cas pour nous. Il faut être prêt à appareiller pour faire le tour de l'île si l'orientation du vent change ou si la houle se lève.
Sir Ernest est là, juste derrière le moaï

Port
Le port de Hanga Roa est minuscule, il accueille des barques de pêche qui sont amarrées à des relies aériennes qui vont d'une rive à l'autre. On ne peut s'y rendre qu'en annexe. Un alignement permet de passer entre les vagues qui déferlent et où s'éclatent les surfeurs:
— du mouillage repérer le phare rouge et blanc du petit port.
— Se diriger à la droite du port, en direction d'un récif émergeant juste au large des vagues de surf. (Autre repère, la banque — bâtiment brun foncé aux vitres blanches devant lequel il y a toujours plusieurs voitures.)
— En s'approchant du récif, on discerne de mieux en mieux les pilônes des projecteurs du stade de foot. — Prendre la direction du port dès que l'on peut superposer les deux pilônes de droite et suivre l'alignement jusqu'à l'entrée du port.

Le minuscule port de Hanga Roa
Lessive
Il y a une lavanderia en ville, très onéreuse. Nous avons suivi les conseils de Tidoudou et fait faire notre lessive au camping Ti Pani Moana, dans les hauts de Hanga Roa. Prendre un taxi la première fois pour y aller. Après plusieurs jours de navigation, cet endroit est un havre de paix et de verdure. 

Internet
Plusieurs cyber en ville; la bibliothèque municipale offre du wifi gratuit. Nous avons une clé Entel (telecom du Chili) que nous rechargeons et qui nous permet de surfer depuis le bateau... mais cela ne fonctionne pas toujours très bien.

Approvisionnement
Il y a plusieurs supermarchés en ville; on trouve fruits et légumes locaux (ananas, tomates, maracujas, patates et patates douces, courges, pastèques, oignons, salades, avocats, etc...) tous les matins dans la rue principale. La viande (beaucoup de poulet) est congelée. Une panaderia au bout de la rue principale, à droite (nous nous sommes gavées de délicieux empenadas...)

Fuel et huile moteur
A la bombina, la station essence qui fait aussi supermarché. On y trouve du Nutella ... et des chips !

Eau
Nous avons pu faire le plein d'eau au robinet du club de plongée Orca. Leur demander.

Météo locale
Auprès de l'Armada, dont les bureaux surplombent la baie (bâtiment rouge à droite).


Banque
Une banque Santander sur le front de mer, à droite du port, avec des distributeurs et un bureau de change. A Rapa Nui, on paie en pesos chiliens, même si certaines agences touristiques semblent accepter les dollars.

Transport
Plusieurs agences de locations de voiture et de nombreux taxis

La traversée en chiffres et en images

Voici quelques images pour illustrer les événements marquants de cette dernière traversée:

Nous avons eu quatre problèmes techniques sérieux: 
le remplacement de la goupille de l'axe du vis de mulet 
remplacement d'un des axes de la barre (...  inox complètement rouillé... )
déchirure du génois - remplacé par le vieux qui reprend du service
et l'éternel problème de pression d'huile du moteur — amélioré par une vidange faite au large


Plusieurs moments de bien-être: Mahaut regarde How I met ou Walking Dead, ensemble nous avons regardé Studio 60 on the Sunset Strip.


Environ 15 jours de près, plus ou moins serré ....


 21 jours au même cap

Nous avons préparé quatre gâteaux: des cookies, un crumble au pommes, un crumble au bananes et des escargots à la cannelle



 Un anniversaire ! Les 16 ans de Mahaut, le 3 mars, par 19,5 degrés de latitude sud et 104,5 degrés de longitude ouest

Une bouteille de champagne rose pour fêter dignement cet événement


Des tas d'arc-en-ciel comme celui-ci...

Des pages et des pages de journal noircies...


Au moins 50 grains comme celui-ci...

Une douzaine de livres lus, y compris les lectures scolaires comme ici, Jenseits der Stille

Mais.... mais nous n'avons rien pêché, nous n'avons vu aucun cétacé et juste quelques paille-en queue.

jeudi 13 mars 2014

Oui, nous y voici enfin !


Nous y voici enfin. Fatiguées, au bout du rouleau, crevées, épuisées... mais nous y sommes ! Après une traversée vraiment difficile.


Cela a commencé par le courant, en quittant Isabela, qui nous dépalait vers l’ouest alors que nous voulions faire du sud, puis une espèce de remake de Pot-au-Noir égaré entre 3o et 5 o Sud — avec de la pluie, de la pluie, encore de la pluie;  puis du près serré; puis une semaine de vent hyper changeant nous obligeant à d’incessants changements de voile; puis du calme se prolongeant plus que de raison...  A se demander si nous avions offensé les Dieux, s'ils voulaient nous empêcher d'atteindre Rapa Nui.

Et enfin ! L’île qui se devine, l’île qui se discerne, l’île qui se voit clairement, l’île qui se rapproche, on voit des maisons, on voit du bétail, on sent les odeurs de la terre, on voit le mouillage, on arrive ...


Pascua Radio nous appelle à la VHF: qui êtes-vous, d’où venez-vous, combien êtes-vous à bord, quelles sont vos intentions ? Les questions habituelles. Mon interlocuteur m’annonce la visite des autorités à bord demain matin, à 8h.

Le soir tombe, la lumière est belle en approchant de la baie de Hanga Roa. A vrai dire, ce n’est pas vraiment une baie, car le mouillage n’est absolument pas protégé. Si le vent tourne (en ce moment il souffle d’est, donc grosso-modo de la terre, donc cela va) cela devient dangereux pour les bateaux comme nous qui doivent trouver un autre mouillage de l’autre côté de l’ile.


Lundi soir, à notre arrivée, il y avait déjà deux voiliers dansant sur leur ancre. Nous passons tout près de l’un des deux qui nous conseille de mouiller à proximité.
Quoi ?! Mais il y a 25 mètres d’eau ! Nous ne sommes pas un cargo !!
Mais il insiste et nous racontera le lendemain que, plus près de terre,  là où les fonds sont moindres, il n’y a que de la roche. Le second bateau y a cassé sa chaîne et lui-même a dû faire appel à un plongeur pour démêler son mouillage emberlificoté dans le corail. Tandis qu’ici, à plus de 20 mètres de fond, il n'y a que du sable. Donc c’est bien.

Le lendemain, les autorités débarquent. Il y a l’Armada du Chili, le ministère de l’agriculture, les douanes, la police, l’immigration, et j’en oublie sûrement car ils sont venus en deux fois. Très sympas, très courtois, très souriants, jeunes et beaux.
Et voilà, plusieurs tampons plus tard, nous sommes vraiment arrivées ! Reste à gonfler le dinghy, à croiser les doigts pour que le moteur démarre, et à trouver le chemin de la cale des pêcheurs entre les vagues qui déferlent tout là-bas .

Les deux voiliers voisins s'en vont. Direction ouest, vers la Polynésie, en passant par Pitcairn et les Gambier. Mais Sir Ernest n'est pas tout seul: deux énormes paquebots viennent d'arriver.

Deux à la fois ! C'est plutôt inhabituel, me disait tout à l'heure un de nos visiteurs officiels. D'habitude, il y a un paquebot par mois pendant la belle saison, entre décembre et avril. Et les voiliers ? Ils sont environ 30 par année... Et cette année, il y a nous.



mercredi 12 mars 2014

Arrivées à Rapa Nui

Enfin !! Enfin, nous sommes arrivées à l’Île de Pâques ou Rapa Nui de son nom indigène. Nous pouvons enfin poser les pieds sur de la terre et voir autre chose que de la mer à perte de vue.
Nous sommes arrivées lundi tard dans l’après midi et ce fut un moment absolument magique pour moi. Joya a cru apercevoir une forme sur l’horizon dès le matin, mais c’est dans vers 14h que l’île s’est vraiment dessinée sur la mer. Et puis elle a grossi, grossi. Nous avons mis les gaz pour arriver le plus vite possible et surtout avant la nuit. Nous n’avions absolument pas envie de tourner autour du mouillage en attendant le lever du jour. Nous voulions arriver.
Nous avons bientôt pu apercevoir les couleurs de l’île, de l’ocre et du vert. C’était génial.
Nous nous sommes encore approché et nous avons longé la côte pour arriver sur l’ouest, à Hanga Roa, la ville de l’Île de Pâques. Joya est allée se reposer un moment pour reprendre un peu de forces avant l’arrivée et je suis restée à la barre, occupée à fixer le point qui me servait de repère. Cela faisait une bonne dizaine de minutes quand je me suis retournée subitement et j’ai réalisé ce que je voyais. De la terre. Des collines vertes et nue, très douce. C’était un paysage absolument sublime. Je ne sais pas si c’est parce que je n’avais plus vu de terre depuis trop longtemps, mais cela a été l’une des plus belle chose que j’ai vu. Malheureusement, les photos ne rendront pas justice à cet endroit.
Nous avons donc encore progressé et soudain le vent a tourné suffisamment pour nous apporter les odeurs de la terre. Ces odeurs ! C’était juste... indescriptible de bonheur. J’avais envie de chanter, de danser, de pleurer et de rire. Ces odeurs sonnaient comme une mélodie en moi. En général, nous nous fions beaucoup à notre vue. Mais là, ce fut l’odorat qui prit le relais.
Au début, j’ai simplement senti une odeur de terre sèche, d’herbes. Ce sont des odeurs toutes bêtes mais qui sont magiques après des jours de traversée. Puis, un parfum moins défini que j’ai assimilé à celui des noix. Au passage, j’adore les noix. Puis, ce fut une odeur plus forte de café qui prit le pas sur mes sensations.
Entre temps, Joya s’était relevée et nous arrivions presque. Aux jumelles, j’ai aperçu des maisons ! Et puis, plus haut, il y avait une grande étendue verte où paissaient des moutons. Des moutons ! Vous imaginez ? Je n’aurais jamais cru être aussi heureuse de voir de petites taches blanches.
Enfin, les maisons se sont multipliées et nous nous sommes arrivée en vue de la baie. Et là, quelqu’un faisait un grand feu et cette dernière odeur nous est parvenue avec force. C’était magique. C’était tellement bon.
Dans la baie, deux bateaux étaient déjà ancrés et lorsque nous nous sommes approchés, le couple de français du bateau le plus proche nous a conseillé de nous mettre près d’eux. C’était le dernier patch de sable, ensuite il n’y avait plus que des rochers. Au sondeur, nous avons vu 24m. Oulah. Le plus profond que Joya avait jamais mouillé était 13m et nous avons bien plus l’habitude de mouillage à 6m. Mais bon, nous étions prévenues. Nous nous sommes donc mouillées au couché du soleil par 24m de fond avec toute notre chaine plus une rallonge de boute de quarante mètres.
Ensuite, la nuit est tombée. Heureusement, la mer était lisse et le vent ne soufflait pas trop fort. Nous nous sommes couchées épuisées et incapables de réaliser.
Nous sommes arrivées à Rapa Nui.

samedi 8 mars 2014

Un marathon à la voile... c'est long!

Cela fait quatre jours que nous avons un temps magnifique. La mer est toute lisse, le ciel d'un bleu magnifique et nous profitons du soleil pour faire sécher le bateau de l'humidité. C'est super, me direz-vous. Oui, mais voilà le hic : Il n'y a pas du tout de vent. Il est presque impossible d'avancer à la voile.

Nous avons donc beaucoup fait tourner le moteur. Le premier problème, c'est que nos réserves de fuel ne sont pas infinies et nous ne savons pas si nous pourrons remplir nos bidons à l'île de Pâques. Il nous faut donc quand même avancer à la voile, coûte que coûte. Le second problème est que nous n'avons plus de pilote automatique (qui barre quand nous sommes au moteur). Il a rendu l'âme à la fin de la traversée vers les Galapagos. Cela implique que nous devons barrer 24h/24h et c'est épuisant. Après l'horreur des jours précédents, nous ne sommes pas vraiment dans la meilleure des formes et ce n'est pas cela qui nous repose. Il faut donc naviguer à la voile et donc accepter l'idée de faire presque du sur-place. L'île de Pâques semble encore tellement loin...

C'est toujours la fin du voyage qui est la plus difficile, lorsque nous y sommes presque mais que ce presque reste encore en travers de notre route. Nous sommes à 200nm de l'arrivée, c'est si peu ! Mais ce n'est pas à moins d'un noeud (c'est à dire un mille nautique par heure !) que nous allons y arriver. Nous sommes sorties d'un enfer pour en retomber dans un autre. On le savait, on le savait que ce serait difficile. Nous étions prévenues que c'était l'une des pires traversées qu'il était possible de faire. Bon, et bien autant vous dire que notre moral n'est plus très haut. Quatre jours nous semble des années. Ce sont les derniers kilomètres pour un marathonien qui sont les plus éprouvants, non ?

Et bien rappelez-moi de ne jamais faire de marathon.
M.

lundi 3 mars 2014

Coup de fatigue

Ces deux derniers jours ont été et sont toujours épuisants. Il semble que le vent nous en veuille, ou alors qu'il a décidé que c'était un peu trop facile depuis une dizaine de jours... Nous essuyons jour et nuit grains sur grains, c'est-à-dire de la pluie et du vent fort. Entre ces périodes qui ne sont pas franchement de la rigolade, nous nous retrouvons dans de fortes molles. Il faut en permanence régler le bateau : prendre un ris, lâcher un ris, dérouler du génois puis le réenrouler vingt minutes plus tard...

Le jour, c'est déjà éprouvant, mais cette nuit a été... dure. Nous avancions en pleine nuit noire et il était donc très difficile de prévoir à l'avance le vent qui forcissait. La grand-voile battait horriblement fort dans les calmes puis le vent sifflait tout à coup. Cette inconstance a mis nos nerfs à rude épreuve et je n'ai pas beaucoup dormi. Joya encore moins.

Aujourd'hui, c'est simplement la suite de cette nuit. Nous sommes fatiguées, mais en même temps, nous avons pris le rythme. Ce qui est bien, c'est que j'ai toutes les occasions du monde pour m'entraîner à manoeuvrer! (Mettre un ris, le défaire, rouler, abattre, etc.) Joya dort un peu en ce moment. Je tenais à raconter ce côté moins joyeux de l'histoire. En ce moment, c'est difficile et je pense qu'il faut le dire. Mais cela finira par passer. Et puis, nous avons franchi les deux-tiers de la traversée !

Allez, encore quelques centaines de miles et on y est ! J'espère que demain, pour mon anni, il fera un peu meilleur. Bon, de toute façon, ce n'est pas nous qui décidons, n'est-ce pas ? Mais si vous nous souhaitez très fort du beau temps (et constant avec ça !), peut-être que ça marchera...
Mahaut